dix-huit mois de recherche-action au sein d’une résidence sociale, artistique et temporaire à Strasbourg

10 ¦ 2019
Hospitalités

Dix-huit mois de croisière sur l'Odylus

10 ¦ 2019 · Hospitalités L'Odylus, un lieu d'accueil ?
En questionnement La question de l’intimité à l’Odylus et la manière dont les résident·e·s se perçoivent
Illustration Portrait de M., résident à l’Odylus, assis sur son lit
Auteur·e·s Marion, artiste photographe en résidence à l’Odylus de juin à octobre 2019

 « Dix-huit mois de croisière sur l'Odylus Des habitants comme des passagers.
Parfois en mouvement. Parfois à l'arrêt.
L'un de leurs points communs est d'être ici.
Des tranches de vie qui gravitent.
Il y a eu des rencontres et des dialogues.
Sans quoi rien n'arrive.
Je suis passée de chambre en chambre.
L'une m'ouvrant la porte de la suivante.
Ces chambres n’en sont pas seulement.
Ce sont aussi des lieux de vie, des salles à manger, des pièces de jeux.
Des espaces pouvant se fermer à clé.
Et qui deviennent très précieux aux yeux de chacun.
Transformant peu à peu mon chemin en un véritable voyage. »

Marion est photographe, elle a 34 ans. Son travail artistique interroge l’intime, le rapport à soi mais surtout le rapport aux autres :

« J’ai été diplômée de l’école des arts décoratifs de Strasbourg en 2010 et depuis, j’ai décidé de rester ici. J’ai commencé la photographie comme un prétexte pour rencontrer des gens sur ma route, pour accéder à des endroits fermés, pénétrer des lieux de travail ou des intérieurs, arpenter des bouts de territoires chargés d’histoires. Je m’intéresse aux thèmes de la famille et de la mémoire intime ou collective. Je suis fascinée par les objets trouvés ou transmis de génération en génération, par la valeur sentimentale que peut avoir la simplicité, les témoignages qui se construisent autour de lieux remplis de souvenirs. Je questionne les différentes traces laissées par notre passage, sur nos actions, les combats menés, le quotidien propre à chacun, nos croyances. Cette approche me permet d’adopter le regard du témoin face à des trajectoires distinctes. Mon travail se développe avec des projets sonores, des recherches archivistiques et de multiples chantiers autour de l’images photographiques. Cette pluralité m’inspire.

Horizome m’a proposée de travailler au sein de la résidence Odylus et m’a donné carte blanche. D’abord, j’ai voulu explorer le lieu, observer son organisation, rencontrer et connaitre ses résidents, faire un travail d’immersion avant d’avoir des idées, avant de plonger tête baissée dans un projet – d’où ma présence assez régulière. Je ne me voyais pas toquer aux portes pour demander de «faire des photos». C’était important pour moi de prendre ce temps, pour rencontrer, échanger et surtout comprendre. Petit à petit j’ai fait partie du «décor». C’est à partir de là que j’ai pu rentrer dans les chambres et que mon projet a pris tout son sens. Ces chambres n’en sont pas seulement comme son nom l’indique. Ce sont aussi des lieux de vie, des salles à manger, des pièces de jeux, des espaces qui peuvent se fermer à clé et qui deviennent très précieux aux yeux de chaque résident. Les différentes situations personnelles qui les ont amenés jusque-là, décuplent leur valeur en tant que pièces. Mon projet documentaire se compose comme une enquête photographique, entre récits anecdotiques, portraits et images en creux (= représentation visant une personne par son absence sur la photographie). Il présentera toutes ces tranches de vies qui gravitent dans ce lieu éphémère et attachant, capturées pendant des moments en tête à tête. Ce travail sera exposé au sein de l’Odylus, un accrochage imaginé comme un «arbre généalogique» sans lien de parenté avec ce point commun d’être tout simplement ici. En parallèle, j’ai eu l’idée de construire au fur et à mesure du temps une exposition sur le mur de l’entrée où chaque résident pouvait partager sa propre représentation de l’Odylus par UNE image photographique accompagnée de son prénom, son âge et son numéro de chambre écrit manuscritement. Une manière pour moi d’aborder, d’expliquer mon projet et d’envisager avec chacun la construction d’une œuvre collective. » ↙